|
CL-Archives - People : Discrète Margaret Sanga (Lejourquotidien.info-21.11.2011) Écrit par Stéphane Tchakam
Pionnière de la lutte contre le sida au Cameroun, ce médecin réservé et à la fibre humanitaire a contribué à mettre sur pied l´une des Ong les plus puissantes et les plus efficaces, la Swaa Littoral.
Hôpital Laquintinie de Douala dans les années 80. Médecin français en service au pavillon haut standing, le docteur Jeandel vient trouver le docteur Margaret Sanga, sa collègue du pavillon Petit Payant. Il lui demande si elle a entendu parler d´une nouvelle maladie qui s´appelle sida. Non, elle n´en sait rien. Trois cas ont été dépistés au centre Pasteur de Yaoundé et se trouvent actuellement à Laquintinie où ils doivent être hospitalisés. Comme les chambres haut standing coûtent un peu cher, le Dr Jeandel souhaite que le Dr Sanga prenne ces patients dans son pavillon qui dispose de chambres particulières et abordables. Elle accepte et se retrouve avec une veuve, un militaire et un étudiant. Tous les trois présentent les mêmes symptômes : diarrhée, fièvre, maigreur. Tous les trois décèdent au bout de quelques semaines. «Nous ne comprenions rien. Cette maladie-là, nous ne l´avions pas apprise à l´école », se souvient Margaret Sanga. Et pourtant, le sida est là et viendra chaque jour désormais montrer son visage à ce médecin qui, gastroentérologue, voit venir des patients souffrant de diarrhées, s´étiolant et disparaissant très vite.
Il faut réagir. Margaret Sanga commence à chercher, à s´informer, à se documenter. Avec ses collègues Henriette Meilo, dermatologue, et Berthe Bollo, gynécologue, elles sont interpellées par ce qu´on appelle déjà le mal du siècle. Elles apprennent ainsi qu´en 1988 des femmes africaines, réunies à Stockholm en Suède, ont créé la Swaa, la Society for Women and Aids in Africa, l´Association des femmes africaines face au sida. Deux ans plus tard, elles créent une branche camerounaise de la Swaa, puis une branche Littoral en 1991. Margaret Sanga en devient la présidente et ressasse de nouveau ses souvenirs. «Les premières années, nous fonctionnons sans le moindre financement. Ce sont nos familles, nos amis, nos proches qui nous aidaient. Nous utilisions les machines de l´imprimerie de mon mari pour réaliser les premiers dépliants et affiches. Nous accrochions nos banderoles dans la nuit à la lumière des phares des voitures. C´était de l´improvisation et de la débrouillardise.»
Margaret Sanga et ses collègues ont compris que les femmes, de par leur position dans notre société, payeraient le plus lourd tribut au sida. Elles vont donc vers tout ce que Douala compte comme associations féminines pour sensibiliser. « Il n´y avait pas de traitement. Nous connaissions les modes de contamination et on ne pouvait qu´en appeler à la prévention ». Seulement, la radio radote à longueur de journée que le sida est l´affaire des prostituées, des militaires et des étudiants. Du coup, dans les réunions de femmes, les mamans rétorquent à ces certes gentilles dames de la Swaa : «Pardon, votre affaire-là ne nous concerne pas. Nous, nous sommes mariées, nous avons chacune un partenaire. Voyez peut-être avec nos enfants.» La suite des événements leur donnera tort.
Lettres anonymes de séropositifs
Mais le contexte est bien particulier. «Les gens étaient incrédules et ne se sentaient pas concernés. Les quelques patients qui se savaient atteints étaient paniqués, n´osaient pas en parler, glissaient des lettres anonymes sous nos portes pour nous remercier de nous impliquer dans la lutte et pour nous supplier de ne surtout pas révéler leurs identités». C´était à ce point. La Swaa Littoral poursuit ses efforts malgré tout et inspire d´ailleurs les séropositifs qui créent, eux-mêmes, des associations. Résolument sur le chemin de la connaissance du sida et de la lutte contre la pandémie, elle organise des congrès, participe à diverses rencontres ça et là, apprend des expériences menées dans d´autres pays africains, anglophones en particulier. Un long chemin jusqu´au jour où une association américaine propose du soutien et ouvre la voie à des appuis conséquents. Pionnière, la Swaa Littoral est aujourd´hui devenue l´une des Ong les plus puissantes et les plus efficaces dans le pays (voir acquis).
Dans les débuts, beaucoup de femmes médecins travaillent alors à Laquintinie et selon Margaret Sanga, «s´engager ainsi dans la lutte contre le sida n´allait pas de soi. Mais les circonstances avaient voulu que les premiers cas soient dirigés vers nous». Sauf qu´elle ne dit pas tout. Cet engagement, Margaret Sanga y était comme prédisposée. Née à Douala, la petite Margaret a connu une «enfance assez agréable mais un peu mouvementée». La famille voyage en effet beaucoup et doit même, un temps, s´installer en France alors que Margaret n´a que 9 ans. Il se trouve que la mère, une certaine Ngoumou Niat Julienne, première bachelière du Cameroun, est politiquement très active et se retrouve «assez menacée». De retour au pays, Margaret, fille d´enseignante, profite d´une scolarité somme toute normale. C´est d´ailleurs au lycée Leclerc qu´elle obtient son baccalauréat D.
De partout et de nulle part, comme elle dit, elle a vu autre chose et est souvent en porte-à-faux avec ses camarades. Très vite structurée, elle a son siège fait sur ce qui l´attend. « Je voulais aider les gens, aider les plus démunis, les plus pauvres. Chez moi, c´est une nature. Lorsque quelqu´un tombe, je serai toujours la première à me pencher pour le relever. Ce n´est pas toujours bien parce qu´il faut souvent prendre du recul devant la misère, il ne faut pas entrer dans tous les problèmes des gens. Mes parents m´ont toujours mise en garde ». Rien n´y fera. Entre 15 et 16 ans, elle sait que ce sera le social et la médecine. Le père, Félix Ngoumou, est médecin. Au Centre universitaire des sciences de la santé (Cuss) où elle entame ses études, elle voit chez ses camarades de l´espoir et une véritable envie d´apprendre pour aider le pays. Après quelques années à Melen, à Yaoundé, le carabin obtient un doctorat en France avant de collectionner, pour ainsi dire, les spécialisations.
Docteur Tant Mieux
Fille de fonctionnaires, Margaret Sanga ne se pose pas plus de questions que ça. Elle ne demande que le minimum et entend bien faire son boulot. « evenir au Cameroun a toujours été très clair dans mon esprit. Je peux même dire que j´ai pris le premier avion. Je voulais servir mon pays». Margaret Sanga fait donc toute sa carrière à l´hôpital Laquintinie. Lorsqu´on connaît l´environnement, on peut être surpris. Bien d´autres médecins ont en effet quitté la formation publique pour s´installer à leur propre compte. Pas Margaret, véritable esculape qui en avait largement les moyens. «On me l´a proposé. Mais je me sentais utile là-bas ». Plus docteur Tant Mieux que docteur Tant Pis, Margaret connaît Laquintinie dont on dit alors pis que pendre. « Les choses ne se sont dégradées qu´avec la dévaluation du franc Cfa et les baisses de salaire. Une fois que ça commence à se dégrader … Vous n´aviez aucune mesure d´accompagnement. Les loyers des maisons de certains personnels étaient plus chers que leurs salaires. Tout le monde était désemparé. Et beaucoup n´avaient pas le choix. »
Et voilà. Une telle explication peut surprendre celui qui ne connaît pas la présidente de la Swaa Littoral. Celle à qui ses parents ont appris «l´engagement pour les autres, la droiture et l´honnêteté», n´a jamais un mot plus haut que l´autre et garde une équanimité à toute épreuve. Descendante, par sa mère, d´une des plus grandes chefferies de l´Ouest du Cameroun, la très timide et discrète Margaret Sanga croit que ce statut prépare «à avoir de la hauteur, à avoir une vision élevée des choses, à ne pas s´attarder sur les petits détails, à voir les choses en grand. Il y a peut-être des avantages, mais beaucoup de devoirs». Rigoureuse, madame Sanga souffre bien souvent d´incompréhensions. Femme d´ici, elle a connu d´autres horizons. Cela dit, elle n´appartient pas du tout à deux cultures et s´en défend. «Je suis vraiment Camerounaise, j´ai eu à voyager, à partir jeune, à rencontrer des gens qui réfléchissent autrement. Ma mère aussi était comme ça».
Décédée en 2009, Julienne Niat Ngoumou, femme de tête, a en effet influencé sa fille. Présidente du premier mouvement national des femmes camerounaises (Assofecam) au début des années 50, elle a également été de la Fédération des mouvements et organisations politiques confessionnels laïcs de jeunesse du Cameroun. Avant de militer au sein du Parti socialiste de Charles Okala. Une vie politique qui se poursuivra brièvement à l´Unc puis au Rdpc. « Jeune, elle était très engagée et les dernières années, elle était un peu révoltée et s´est désengagée. Peut-être parce que les changements ne sont pas arrivés aussi vite qu´elle le souhaitait. » Margaret Sanga, née Dop Ngoumou Ngassa, a de qui tenir. Toujours à pousser ses proches à s´engager et à poser des actes citoyens. Encourager les artistes plasticiens de la place par exemple. Passionnée d´art, l´amateur Sanga s´entoure des toiles de nos grands maîtres. Des œuvres qui trouvent leur place dans sa demeure à Douala où tout n´est que finesse et goût. D´ailleurs dans la cour, le jardin fait la part belle aux alpinia, cordyline, shefflera, palmiers royaux et autres spathiphylum. «Une vision élevée des choses ».
Cv
1970 : baccalauréat D.
1970 : entrée au Cuss.
1979 : doctorat en médecine.
1982 : mariage avec Jean-Baptiste Sanga.
1983 : 1984, 1985, 1987 : naissance de mes enfants.
1987 : décès de mon père.
2009 : décès de ma mère.
Ce que j´aime : les fleurs, l´art, les livres.
Ce que je n´aime pas : le mensonge, la jalousie, l´hypocrisie, la cupidité.
Mes musiques : j´aime beaucoup la musique afro-cubaine dont j´ai toute une collection. Un peu de makossa aussi et de la variété.
Mes livres : j´ai toujours un livre à la main. Actuellement, je lis « Trois femmes puissantes » de Marie Ndiaye. J´ai aimé lire Victor Hugo, Sartre, Oscar Wilde, Mongo Beti.
Mes peintres : Yamguen, Emati, Mpah Dooh.
Mes amis : mes ami(e)s d´enfance.
Impressions
Dr Henriette Meilo, médecin, collaboratrice à la Swaa et amie : « Très sensible aux inégalités »
Sa maman était une amie de mes parents et on se connaît depuis l´école primaire à Yaoundé. Je la connais depuis toujours. Elle a été élevée par une maman qui avait une très forte personnalité. Elle est pugnace. Quand elle a une idée, elle n´en démord pas. Elle est toujours pleine de projets et moi, je n´arrive pas à suivre. Elle est très exigeante envers elle et envers les autres. Pour qu´elle soit satisfaite, il faut que le travail soit très bien fait. C´est quelqu´un qui a hérité de l´amour du travail bien fait. Elle prend à cœur les problèmes de ses patients. Elle ne bâcle pas son travail. Ça fait qu´elle est très sensible aux inégalités, se bat pour améliorer la condition des patients, se bat pour que le prix des examens baisse, pour que les soins soient gratuits. Elle est capable d´aller trouver le directeur de l´hôpital pour lui exposer le cas d´un malade qui n´a pas d´argent. Là où les autres baisseraient les bras, elle continue. D´où son engagement dans la lutte contre le sida, dans la Swaa et au Lions Club, pour les grandes causes sociales comme la santé. Elle aime beaucoup l´art, la tradition et parle à ses enfants dans sa langue maternelle. C´est quelqu´un dont l´engagement est profond et pas dilettante. Elle est très discrète et les premières loges ne sont pas pour elle. Dans notre combat quotidien, elle est présidente certes, mais elle privilégie la collégialité. Ce qu´elle fait, elle ne le fait pas pour la reconnaissance mais pour sa conscience. Elle a l´impression, impression que je partage, que nous sommes des privilégiés et que nous devons donner un peu aux autres.
Claude Bernard Ngoumou Taffou, transitaire et frère cadet : « Les qualités de notre mère »
Elle a toujours été très indépendante. Notre mère étant souvent absente, c´est elle qui s´occupait de nous, mon frère et moi. Elle se substituait un peu à notre mère et il en a été ainsi aussi bien au pays qu´en Europe quand nous faisions nos études. Notre père étant médecin, elle s´est également dirigée vers cette carrière. Elle est très généreuse et s´occupe beaucoup plus des autres que d´elle-même. Ça, c´est une de ses caractéristiques. C´est sans doute aussi ce qui a renforcé sa vocation pour la médecine et son engagement dans la vie associative auprès des personnes en détresse. Elle est alors très volontaire. Notre mère avait une très forte personnalité, elles étaient très proches et visiblement, sa fille en a hérité de ses qualités : dynamique, autonome, toujours s´engager pour les autres et surtout très intègre. Elle s´engage vraiment sans attendre du retour.
Dr Hubert Leundji, hépato gastro entérologue et confrère : « Un modèle pour la jeune génération »
Je connais docteur Sanga depuis 1990 et ai travaillé avec elle à Laquintinie de 2001 à son départ à la retraite en 2009. C´est une femme très noble avec des qualités humaines et le sens de l´intérêt général. Chaque fois qu´il faut faire quelque chose pour les groupes défavorisés, elle va vers tous ceux qui peuvent aider. Malgré un environnement socio-économique réputé déplorable, elle a toujours fait son travail avec professionnalisme et humanisme. Elle est à l´origine de la création à l´hôpital Laquintinie des pôles de consultation et de suivi des diabétiques et des personnes vivant avec le Vih. A l´époque, ces consultations étaient gratuites. Elle ne quittait pas l´hôpital sans s´être assurée que tous les malades avaient été vus. Elle a régulièrement offert des dons de médicaments et de matériels médicaux aux nécessiteux. Elle est allée au-delà de la médecine hospitalière, la médecine de bureau, pour faire de la santé publique. Je l´ai par exemple accompagnée à l´intérieur du pays pour des campagnes de dépistage du cancer, du diabète ou de l´hypertension. C´est un modèle pour les médecins de la jeune génération.
Acquis : Un tout petit peu
Le centre « Son-Ninka », à Douala, est la vitrine de l´œuvre entamée voilà bientôt vingt ans par la Swaa.
Mot douala, «Son-Ninka» signifie «un tout petit peu». C´est bien ainsi que les dames de la Swaa voient leur action depuis le début. Un tout petit peu parce qu´il y a tant à faire dans la complexe problématique du sida. Modestes, Margaret Sanga et ses camarades n´avaient pas la prétention d´y suffire. Dans la plaquette programme de la soirée de gala organisée par la Swaa en novembre 2008, au bénéfice des personnes affectées par le Vih, la présidente de l´association écrivait qu´aujourd´hui, «de par le monde, et plus particulièrement en Afrique, la pauvreté a un visage de femme. En effet, trois personnes sur quatre vivant en dessous du seuil de pauvreté, avec moins de 1 dollar par jour, sont des femmes : nos mères, nos soeurs, nos tantes, nos cousines du village ! De nombreux obstacles freinent leur émancipation et elles sont les premières à souffrir de la violence, des inégalités qui font le lit du sida. Protéger les femmes, leur donner accès à l´éducation, aux droits élémentaires, à la santé primaire, afin de leur permettre de vivre dignement, c´est aussi lutter contre le sida».
Les enjeux et les objectifs sont clairement définis et pour y arriver, la Swaa qui, dans ses débuts, disposait de locaux à Laquintinie, a ouvert un centre communautaire, le centre «Son-Ninka», au quartier Akwa à Douala. Depuis 2006, ce dernier a d´ailleurs été érigé en centre partenaire de Sidaction, manifestation créée en France en 1994 pour récolter des fonds et sensibiliser sur le sida. Devenu association en 2005, Sidaction répartit les fonds collectés entre programmes de recherches, prise en charge des patients et prévention en France et à l´étranger. Plus de 1 000 personnes sont actuellement suivies gratuitement au « Son-Ninka ». La Swaa se démène pour leur offrir une prise en charge globale, véritable paquet cadeau avec dedans prévention, prise en charge médicale gratuite par des médecins, psychologue, diététicien, dons de colis alimentaire pour soutenir les familles, soutien scolaire des enfants, consultations juridiques, formations, appuis aux activités génératrices de revenus.
Comme aime à dire Margaret Sanga, «les gens ne soutiennent que ce qu´ils voient». La Swaa a désormais pignon sur rue et obtient soutiens et financements parce que l´action est bien visible au quartier Akwa en particulier. Faites-y un tour et vous serez saisi par la convivialité qui règne entre ces femmes, démunies pour la plupart, qui ont retrouvé le sourire et souvent une deuxième famille. Eclats de rire se le disputent alors aux effluves des sauces et autres mets préparés dans le cadre des ateliers diététiques. De quoi mettre l´eau à la bouche à plus d´un journaliste. Depuis deux ans, une soixantaine de femmes ont perçu un pécule pour lancer une activité commerciale. Les mêmes avaient déjà reçu une formation à la fabrication du savon, à la teinture des tissus et le fumage des viandes et poissons. Si les gens ne soutiennent que ce qu´ils voient, voilà par exemple. Les financements extérieurs ne suffisent jamais et les partenaires d´ailleurs attendent que les contributions locales mettent la main à la pâte. Pour un tout petit peu. Ou un tout petit pas de plus.
Libres propos
« Je pense que la santé peut coûter moins cher chez nous. Quand j´étais jeune médecin, il y avait la médecine préventive. Je ne sais pas si c´est encore le cas. Les structures existent mais est-ce qu´elles fonctionnent correctement ? Je pense qu´on peut mettre sur pied une organisation plus simple qui permettrait à nos structures d´être plus accueillantes. Il y a des pays plus pauvres que nous qui ont une médecine de meilleure qualité que la nôtre. Tout ne repose pas uniquement sur l´argent, c´est une question d´organisation, de responsabilisation et d´un peu d´honnêteté… Le manque de repères est en train de faire des ravages dans notre société. Les gens n´ont plus aucun repère. Beaucoup d´enfants ne retournent même plus au village. Beaucoup de jeunes ne parlent pas leur langue. I
ls vivent dans un environnement qui n´a plus rien de ce qui est normal. Les familles sont éclatées. Les grands parents qui auraient même pu faire la soudure ne sont plus là. Les parents partent le matin et reviennent la nuit. Les enfants sont livrés à eux-mêmes. Il n´y a plus aucune morale parce qu´il y a plus de famille. Je crois que c´est une grave crise que nous vivons. Si on n´arrive pas à réhabiliter la cellule familiale, où la mère faisait le lien même quand le père n´était pas là. Si nous n´avons pas une cellule familiale solide, nous ne pouvons pas avoir une société solide. C´est un cri d´alarme. Même si les femmes doivent travailler, il faut qu´elles aménagement un moment pour être là quand les enfants reviennent de l´école.
Vous rentrez dans une maison où il n´y a personne, où les gens ne mangent jamais à table ensemble. Chacun revient à son heure et mange à son heure. À quel moment est-ce que vous allez parler à vos enfants pour leur transmettre votre savoir, votre tradition, l´éducation. Le week end, tout le monde est dans les tontines ou dans les deuils. Non mais regardez ! Moi, ça m´affole complètement. Ce que l´Etat doit faire, c´est de permettre aux femmes de pouvoir encadrer leurs enfants… Dans les traditions, les femmes avaient leur rôle et tout le monde les respectait. Elles ne se mettaient peut-être pas devant les gens pour parler mais on savait quelle était leur place. Ce n´était pas une place de seconde zone. Dans les chefferies par exemple, vous aviez des femmes qui avaient le même rang que des hommes.
Nous sommes une société machiste, mais l´évolution fait que les femmes assument bien des responsabilités et il faudra bien qu´on reconnaisse leur rôle socio-économique… Je suis un peu déçue de la manière dont les femmes célèbrent la journée internationale qui leur est consacrée. Je pense qu´elles devraient en profiter pour faire leurs revendications et se positionner. Ici, on a l´impression que c´est un jour pour une revanche contre les hommes. Ce n´est pas ça le but. On fait des choses pour se positionner, pour montrer que nous sommes là, que nous sommes incontournables, que nous avons une place que nous revendiquons. Que ce soit festif, je suis d´accord mais que ça ne s´arrête qu´à ça, c´est dommage. J´espère que les femmes y penseront… Le féminisme, il y a du bon et du mauvais.
Ça a permis de faire évoluer bien des droits mais je ne suis pas dans la caricature… J´aurai voulu faire davantage pour la Swaa, mais ce qu´on a fait jusqu´ici n´est pas mal. Peut-être que nous n´avons pas eu la possibilité de mieux nous faire connaître, d´avoir plus de financements. Est-ce que c´est conjoncturel ? Quand je vois ce que d´autres associations font dans d´autres pays, je comprends qu´ils sont très loin par rapport à nous. »
|
Respect de la propriété intellectuelle de l' auteur de cet article.
© camerounlink.net
|
|